vendredi 2 octobre 2009

Journées Parlementaires du PS à Toulouse : Les discours d'accueil de Pierre Cohen


La ville de Toulouse a accueilli deux jours durant les Journées Parlementaires du Parti Socialiste qui réunissaient les élus de l’Assemblée Nationale, du Sénat et du Parlement Européen.
Il revenait à Pierre Cohen Maire de Toulouse, de recevoir les Députés et Sénateurs.
Voici l’intégralité des deux discours d’introduction, à ces journées, prononcés par le premier Magistrat Toulousain.


Discours introduction, première journée
Mercredi 20 septembre 2009

« Chers (es) amis(es), chers collègues,
Avec ce séminaire des parlementaires socialistes, Toulouse renoue avec la tradition des grands débats politiques au cœur de notre ville.

Une tradition incarnée par Jaurès, alors qu’il était adjoint au maire de Toulouse, de 1890 à 1893.
Une tradition perpétuée par les Italiens s’exilant pour combattre la dictature de Mussolini dans les années 30 à l’image de Silvio Trentin.
Une tradition poursuivie par les exilés républicains espagnols lors de la Retirada à partir des années 40. C’est d’ailleurs de Toulouse que Felipe Gonzalez a conduit, en 1972, la rénovation du PSOE avant d’en devenir le secrétaire général.

A Toulouse, nous entendons être dignes de l’héritage de Jaurès.
Nous voulons changer cette ville que nous avons conquise l’an dernier après 37 ans d’opposition.
Nous voulons faire de Toulouse une métropole durable, créative et innovante, une métropole solidaire.
Une métropole progressiste, une métropole de gauche.

Elle en a les atouts, avec ses universités, ses laboratoires de recherche, ses écoles d’ingénieurs, son industrie aéronautique et spatiale, le développement des nano et des biotechnologies, ses 15000 habitants supplémentaires chaque année.

Toulouse est une ville de patrimoine et d’histoire.
Mais elle est aussi une ville populaire, savante, dynamique.

Elle prend aujourd’hui son envol pour devenir une grande métropole d’Europe.
Une métropole où nous voulons faire souffler un vent nouveau, qui protège ses citoyens et qui prépare l’avenir.

Bienvenue à Toulouse. »

Discours d’introduction de la 2ème journée
Jeudi 1er octobre 2009 – 9h 15
« Messieurs les Présidents de groupe,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Président du Conseil régional,
Mesdames et Messieurs,
Chers amis,

J’ai souhaité intervenir à nouveau ce matin, parce qu’au-delà du plaisir que j’ai à vous recevoir à Toulouse, il est un sujet qui me tient particulièrement à cœur et sur lequel j’aimerai revenir : celui de la réforme territoriale, qui sera présentée en conseil des ministres en octobre.

Ce sera, à mon avis, l’une des grandes questions de cette rentrée parlementaire.

Il existe deux grandes conceptions de la décentralisation : celle défendue par la droite, qui consiste à se décharger sur les collectivités territoriales de compétences que l’Etat ne souhaite plus assumer, sans verser les compensations financières à la hauteur des charges transférées. Paradoxalement, elle affaiblit, in fine, la puissance publique en maintenant les collectivités territoriales dans une situation de dépendance.

L’autre conception se situe dans la droite ligne des réformes engagées par Gaston Deferre en 1982 puis Lionel Jospin par la suite, par le biais des lois portant sur la solidarité et renouvellement urbain ou encore celle relative à la démocratie de proximité. Elle repose sur une véritable notion de territoire et affirme le rôle de la puissance publique, conçue comme un ensemble Etat/collectivités territoriales, où chacun assume des missions clairement définies, avec une fiscalité adaptée.

Cette conception, que je défends, que nous défendons tous ici, part de ce qui devrait être la finalité de toute action publique : les besoins et les attentes des citoyens. En renforçant le lien entre les citoyens et leurs représentants locaux, elle est le ciment de la démocratie locale.

La réforme territoriale qui se profile n’annonce rien de bon, ni pour la décentralisation, ni pour la démocratie locale.

Opposer régions, départements et métropole pour aboutir à une reprise en main des véritables leviers par l’Etat, ce n’est pas une réforme de la décentralisation, c’est une recentralisation. Recentralisation d’autant plus irresponsable qu’au lieu de générer de la cohésion, elle tente de s’imposer par la division.

Derrière l’avant-projet de texte se profile l’idée de contrôler l’organisation et le développement des territoires. Ce serait donc le préfet qui, par exemple, fixerait les conditions de l’intercommunalité et le périmètre des métropoles !

Trop d’échelons, trop d’élus, trop d’indemnités, trop de dépenses, nous serine-t-on.
Il faut évacuer cette fausse question du nombre d’élus et du coût de la puissance publique. La réforme annoncée ne concerne que 1% des élus ! Dans ces conditions, de quelle économie d’échelle parle-t-on ?
On évoque les dérapages financiers supportés par les contribuables en raison de la confusion des responsabilités entre les collectivités locales. Deuxième idée fausse ! 90% des actions engagées par les départements et les régions relèvent de leurs champs de compétences propres.

En réalité, tout porte à croire que la réforme territoriale voulue par Nicolas Sarkozy n’a d’autre ambition que de permettre à la droite de reprendre le pouvoir dans les régions et les départements actuellement dirigés par la gauche. Le mode de scrutin des conseillers territoriaux, uninominal dans les campagnes et proportionnel dans les villes, couplé au redécoupage des circonscriptions législatives, permettrait d’assurer, partout, l’hégémonie de la droite.

Pour autant, ne faut-il rien changer ?
Si, bien sûr.
L’organisation de notre territoire doit être repensée, notamment en raison du fait urbain.
Les villes accueillent aujourd’hui les deux tiers de la population. Ce phénomène est incontournable et irréversible. Cette concentration de la population entraîne des phénomènes d’exclusion, de discrimination, que nous devons contrer par une politique de la ville ambitieuse, des orientations urbaines cohérentes, structurantes et spatialisées.

Nous devons avoir, à l’échelle de l’agglomération et même au-delà, une vision globale de l’ensemble du territoire : pour définir les densités de population, programmer l’habitat, préciser la place de l’automobile, réduire les distances entre le lieu de travail et le domicile, faciliter le lien social et d’une manière générale reconquérir la qualité de vie en ville.

Nous devons avoir les moyens de promouvoir à la fois des métropoles des proximités, où se joue le lien social, et des métropoles de taille européennes, à même de discuter d’égales à égales avec Barcelone, Manchester, Munich ou Milan.

Nous avons donc besoin d’outils nouveaux pour structurer notre territoire, éviter l’étalement de l’habitat, établir une politique de transports cohérente et efficace, faire face à l’urgence écologique et climatique.
Nous avons également besoin d’outils pour mutualiser nos efforts en matière de pôles de compétitivité, de développement universitaire, d’attractivité touristique, d’organisation de grands événements culturels et sportifs internationaux…

C’est à ces défis qu’il nous faut répondre aujourd’hui.
Or cette dimension n’est pas présente dans la réforme territoriale que l’on nous propose.

Chaque collectivité devrait pouvoir disposer d’une clause générale de compétence, avec une fiscalité propre lui permettant de mener à bien l’ensemble de ses missions. Des missions claires et compréhensibles par tous.
Ce que nous propose l’acte III de la décentralisation, ce n’est ni plus ni moins que la reprise en main et le contrôle des territoires par l’Etat.

Ce n’est pas ainsi que l’on renforcera le lien entre les citoyens et leurs représentants locaux, que l’on renforcera les services publics et in fine, que l’on favorisera le vivre ensemble.
Ce n’est pas ainsi que les territoires prendront leur place dans le concert européen.

En tant que parlementaires de gauche, nous avons une lourde responsabilité.
C’est nous qui, avec Defferre, Chevènement, Jospin, Voynet et tant d’autres, avons été les initiateurs de la décentralisation. C’est nous qui l’avons mise en place, l’avons amendée, améliorée, poussée.

Nous devons aujourd’hui être porteurs d’une véritable réflexion alternative à celle de la droite sur l’organisation des territoires, dans l’esprit de celles que nous avons initiées, en prenant en compte les réalités sociologiques, urbaines, économiques d’aujourd’hui.

L’avenir de notre territoire et la qualité de vie de nos concitoyens en dépendent.

Je vous remercie de votre attention. »